La mélancolie c'est du bonheur qui se repose.

Samedi 5 juillet 2008 à 17:15


Midi trente.
Toujours aucune traces.


Etrangement on le croyait parti depuis longtemps quand on s'est dirigé en retard vers le portail. Adossé au mur, il regardait la rivière qui coulait en contre-bas. Il nous attendait. En passant à ses côtés il n'ajouta pourtant aucun mots mais entra dans le rang, comme si il ne l'avait jamais quitté. Après quelques kilomètres parcourut en notre compagnie, il nous laissa au carrefour. Comme tout les samedi midi.

Je ne le connaissais pas personnellement. L'ami de l'ami d'une amie, rien que ça. Sans que l'on sache vraiment pourquoi, il faisait toujours ce petit boud de chemin avec nous. Jamais un son, jamais un signe de la main de sa part, parfois un brin de sourire, et encore seulement quand il pleuvait. La pluie, il adorait ça -enfin c'est ce que je pensais car ces jours là il avait ce certain sourire aux bords des lèvres- .

Il n'était même pas dans notre bahut. D'après le peu de renseignements que j'ai fini par récolter, il n'habitait même pas par chez nous. Son petit boud de chemin n'était en fait qu'un ralongement qu'il pouvait très bien éviter. La seule personne qu'il aurait pu connaître ne rentrait que rarement avec nous. Lui, j'ai fini par croire qu'il s'en foutait de l'ami en question.

Je crois bien qu'il s'appelait ludovic. Ludovic Simonet je crois ... ou autre chose.
Parfois bien sûr on lui posait des questions. Enfin "on", eux parce que moi je trouvais qu'il vallait mieux le laisser dans son mutisme tant il avait l'air de s'y plaire. Alors on a fini par découvrir qu'il n'était pas muet. Plusieurs on étaient déçut. Cetains y ont perdu de l'argent.
Les ragots on commencés. 

Les chuchottements abondaient autour de lui mais personne ne savait vraiment qui il était.
Faut dire qu'il avait la classe ludovic. De deux ans plus vieux que nous. Un non-soucis de la pensée d'autruit. Grand, brun, le cliché du mec mystérieux par excélence. Je ne pense pas qu'il ai un jour sût pour tout les "on dit" qui touraient autour de lui. Ca l'indiférait sûrement et ils ont simplement fini par cesser d'eux même.

Alors on s'est fait à sa présence, moins encombrante que celle d'un piaf qui piallerait à longueur journée et qu'il faudrait nourrir. Parfois on l'oubliait le temps de l'appercevoir qui nous attendait dans un coin de la cour, jusqu'à ce que l'un de nous dise "Tien il est pas là aujourd'hui Lemuet ?". Lemuet.
Si on l'aimait ? On va dire qu'il les amusait bien finalement.

C'est vrai qu'il parlait peu. Moi je trouvais que ce n'était pas donné à tout le monde. Que certains auraient mieux fait de l'immiter plutôt que de pinailler.
On ne s'accomodait pas de lui parler, on ne cherchait pas non plus à en savoir plus sur lui. Même si souvent ça nous interloquait beaucoup, on le laissait à ses rêveries.


Maintenant ça fait trois samedis de suite qu'on ne l'a pas vu.
Les ragots disent qu'ls s'est noyé.


photo by mich

Jeudi 12 juin 2008 à 17:39



J'ai toujours vu son regard comme au travers d'un ordinateur.

Que ce soit à Montmartre, aux restaurants, ou encore allongés dans les plaines de Dordogne. C'était ses yeux qui se déplaçaient de droite à gauche, la lumière blanche de l'écran qui lui donnait un teint blafard, son sourir qui semblait distant pourtant, mais il était présent. Ne serait-ce qu'en apparence. Chaque fois qu'il relevait la tête, c'est comme s'il revennait d'ailleur. On avait l'impression que son regard disait "Quoi, j'ai manqué quelque chose ?" Alors je souriais le temps de ne pas l'affoler. Puis il retournait de là où il vennait, pour reprendre ce qu'il avait laisser pour venir m'écouter.

Dimanche 1er juin 2008 à 21:27


Te souviens-tu de cet air. De cet air de piano. De celui que tu aimais, celui qu'on aimait tant. Tu me le jouais, chaque fois que l'on allait chez toi. On rentrait à peine que je déposais mon sac et qu'impatiente j'allais me placer sur le banc. Pafois j'ouvrais ton cahier de partitions, de peur que tu l'oublis mais chaque fois tu me rejoignais -non sans un sourire aux lèvres- qui sait à quoi tu pensais, et tu le refermais. Alors tu t'asseyais à mes côtés, et te mettais à le jouer, notre morceau, instinctivement, et plus rien ne pouvait nous sortir toi, et moi, de cet univer dans lequel on vennait de tomber. On l'écoutait. On écoutait cet air que j'avais composé, que tu avais su écouter, et que maintenant tu nous interprêtais. Chacun à ses petits secrets. Ca c'était notre truc, rien qu'à nous. Une simple mélodie mais notre mélodie quand même. On savait l'entendre nous, parce qu'elle nous parlait. Parce qu'on la comprenait. C'est pour cette même raison qu'on se la réservait.

Puis un soir de décembre on s'est dit pourquoi pas.
C'est fou comme les clichés peuvent être si vrai parfois. Après l'avoir écouté, cette énième fois de plus, c'est là qu'on s'est décidé. Alors on est ressorti, après que tu ai refermé le rabat. Remis nos sac au dos. Partis sans savoir où. 

 

Jeudi 15 mai 2008 à 21:32


 

Hier soir, on est mort tout les deux, main dans la main.
Te souviendras-tu jamais ?
Mort, c'est vrai que c'est un petit peu dur. Disons que l'on en avait marre de cette pouriture de vie alors on est allez voir ailleurs, si l'herbe était plus verte. Pas cool ? Ouais pas cool. Quelle connerie tout de même. Allez tu sais quoi pour une fois j'ose avouer qu'on a peut-être fait une erreure. Une grosse ? Non faut pas exagérer mais c'est vrai que ça porte à réflexion. Tous les regards du monde étaient braqués sur nous, la télévision aussi. Mais ça ne nous à pas ralenti. C'est vrai qu'on l'a cherché pourtant ce putin de regard d'autrui, mais je dois dire que sur ce coup là on n'en avait plus rien à faire. Alors on a sauté. Depuis ? Le néant je dirais. Personnelement je n'ai apperçut ni le tunnel ni sa lumière de fond. Juste une vision d'horreur en sautant, le temps de ce rendre compte de nos actes, et puis plus rien. Je ne me souviens que de ce que je te raconte. Hé tu m'écoutes ? Non, comme d'habitude. Je ne t'en demande pas plus. Rien d'autre.
Tout est tellement fini maintenant.


 

Mercredi 23 avril 2008 à 22:31



Tous les soirs, même heure, même endroit, il était toujours présent. Quoi qu'il se passe, par tous les temps, il se plaçait là et observait les alentours. Je suppose qu'il aimait ça. Quand on y pense il fallait bien qu'il aime ça pour sortir, lorsqu'il pleuvait des cordes, emmitouflé dans son gros pull en laine, se poser sous sa vérenda. De sa venue, suivait toujours l'allumage des réverbères de la rue St Louis, de sa rue à lui. La rue d'en face. Puis il refermait sa porte d'entrée non sans avoir au préalable fait le tour de sa maison pour vérifier que tout était bien véroullé. Il revenait ensuite s'asseoir dans son rocking chair et il attendait patiement, en se balançant. Ne me demandez pas ce qu'il attendais parce que moi même je n'en savais rien. Plusieurs fois je me suis adossée à la fenêtre, poussant du bout des doigts les rideaux. Et je le regardais. Il m'intriguait ce viellard. Non pas seulement parce que personne ne vennait le voir, parce qu'il ne disait jamais rien ou qu'il restait des heures enfermé à l'interieur sans montrer le bout de son nez, mais parce que quand il était sur ce péron, assis les bras branlants, il avait toujours cet air, ce petit air que seules affichent les personnes satisfaites. Mais personne ne savait d'où le sien lui vennait.

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