Il était là, assis sur son sofa, à me raconter sa vie comme si je pouvais en avoir quelque chose à faire. J' avait pas mal bu, soirée improvisée, dans un lieu improvisé avec des amis carrément inappropriés. Lui avait pas mal fumé, je pense même qu'il n'avait pas pris que ça. Les yeux rouges comme c'était pas permis, un langage plus que particulier et une constante envie de manger. Mais j'avais accepté de venir lui tenir compagnie, plus parce qu'il avait l'air pommé, à attendre dans le froid, devant la porte de l'immeuble que parce que j'en avait vraiment envie. Peut-être cherchait-il ses clefs, peut-être attendait-il quelqu'un. Peut-être était-il juste un gars un peu trop beurré, un peu perdu. Un peu oublié des autres lui aussi. Quoiqu'il en soit il était tard, je savais que j'étais bien loin de pouvoir aller me coucher dans l'état où je me trouvais et que quitte à dire des conneries autant le faire avec quelqu'un qui ne s'en souviendrait pas le lendemain.
Par moments, il semblait jusqu'à oublier que j'étais présente à ses côtés. D'autre fois il s'emballait, il parlait de son passé comme si j'en avait un jour fait parti, de ses doutes, de ses ambitions. Et c'est lorsqu'il a commencé à faire des plans pour notre avenir, que j'ai fini par me laisser prendre au jeu. Il ne voulait rien d'exceptionnel, pas forcément de grande aventure juste le basique kit de survie. Petite femme, petit boulot. Petite vie mais pourquoi pas. J'aspirais à tellement plus normalement mais ce soir dans son regard brumeux, je me retrouvais un peu trop. En l'écoutant, je me disais que c'était peut-être lui qui avait raison. Finalement on se prenait tous beaucoup trop au sérieux.