Et elle s'en est allée avec son bonheur au coin des lèvres.

A l'arrêt des cars, une petite vieille s'est assise à côté de moi. Pas bien vielle en fait. Ou juste ce qu'il fallait pour qu'on l'appele de la sorte. Le dos voûté, le regard vide. Les mains regroupées sur les genoux, les pieds ballants. Ca c'était plus moi. Elle, elle se tenait bien droite, le regard vif. Les yeux qui pétillent et ce petit sourire en coin de lèvres que je lui enviais. Toute maquillé de partout, toute jolie, comme pour un rendez vous amoureux, sûrement. Je trouvais les rôles un peu mal déservie pour le coup. Et je la jalousais beaucoup.

Je l'observais du coin de l'oeil mais du coin seulement, parce que j'avais peur de la déranger. Qu'elle se sente épiée et donc gênée. Il ne le fallait surtout pas. Pourquoi aurait-elle du se sentir génée qu'on la trouve si fraîche en ce jour grîsâtre, où la normalité moyenne des gens ont appris à se sentir mal. Il ne le fallait vraiment pas ... plutôt qu'elle en profite même.
J'aurais aimé être cette gamine. Bien qu'un peu vieille ça ne se voyait presque pas. Je vous le dit, les rôles semblaient même avoir été interverti. Elle souriait toute seule, face au mur qui s'élevait devant nous, jouant avec sa pièce d'un euro entre les doigts, avec un rien.

Et le car est arrivé.
La gamine est montée dedan. Le car s'en est allé. L'allée s'est retrouvée vide.
J'aurais aimée être cette gamine qui montait dans le car. J'aurais voulut m'en aller aussi les yeux pétillants et le sourire aux lèvres.

Mais ça lui allait si bien à elle.